Publié le 12/10/2010 à 15h55 /

L'Italie, un solide débouché pour les broutards français

// Malgré l'effritement des exportations françaises de broutards vers l'Italie, un marché transalpin plus disputé et des freins attendus pour l'engraissement dans ce pays, les éleveurs français disposent de plus d'atouts que de faiblesses pour conserver leur première place sur ce débouché.

Le marché italien concentre encore 60 % des recettes des exportations françaises de bovins aujourd'hui, des broutards essentiellement, engraissés surtout dans le nord de l'Italie, en particulier en Vénétie. Néanmoins, ces exportations se sont effritées depuis 2003, passant de 640.000 tonnes à  580.000 t en 2009, la demande italienne d'animaux de plus de 300 kilos s'étant stabilisée ces trois dernières années. Mais la France dispose toujours de davantage d'atouts que de faiblesses face au débouché italien car elle possède les disponibilités européennes les plus élevées. Avec 8 millions de vaches, dont 4,3 millions d'allaitantes environ, elle est le premier détenteur européen de cheptel allaitant, soit 34 % du cheptel allaitant européen, et elle a renforcé son activité naisseur depuis 1998. Au niveau européen, à  regarder les échanges de bovins vivants (plus de 300 kilos) destinés à  l'engraissement, on observe que le flux franco-italien prend toute la place. Selon l'Institut de l'élevage, la France demeure, et de loin, le principal fournisseur de bovins en Europe, à  87 % en 2009. L'Italie, de son côté, reste le principal importateur européen de bovins vivants, à  86 % en 2009, et de viande bovine puisque son cheptel est à  80 % laitier. Elle est aussi le deuxième consommateur de viande de boeuf en Europe après la France. Ses abattages ont reculé de 13 % en têtes pour les gros bovins depuis 1999 et de 8 % en têtes pour les jeunes bovins et génisses. « Ce marché reste donc rémunérateur pour les exportateurs », commente Mélanie Richard de l'Institut. Les importations italiennes de viande bovine réfrigérée et congelée n'ont d'ailleurs cessé de croître depuis 1999. Concurrences irlandaise et d'Europe de l'Est Cependant, l'export de jeunes bovins français va rencontrer certains freins ces prochaines années, si ce n'est déjà  le cas, et ils doivent être surveillés par les éleveurs et les commerçants en bestiaux. Le marché italien est d'abord plus disputé. Sur les broutards, l'Irlande et les pays de l'est de l'Europe comme la Slovénie ou la Hongrie sont devenus des concurrents. Ils présentent un avantage prix par rapport aux animaux français et les pays de l'Est sont plus proches géographiquement. Néanmoins, la France conserve une bonne image en dépit de prix jugés élevés et d'une saisonnalité de sa production pas toujours bien adaptée à  la demande. L'autre menace réside dans la stratégie de la grande distribution italienne, qui concentre 52 % des ventes de viande bovine en Italie, même si les boucheries traditionnelles pèsent encore 37 % des ventes (20 % en France). Pour soutenir la consommation nationale de viande de boeuf, les GMS misent sur une baisse des prix, stratégie qui pénalise la valorisation du broutard français. Ainsi, la place du coeur de gamme (franco-italien) s'est réduite au profit de la présence de plus en plus grande dans les rayons de premier prix de viandes importées de Pologne, d'Allemagne, d'Irlande, mais aussi issues de jeunes bovins laitiers français. Les GMS italiennes s'orientent aussi vers une valorisation « viandes du monde » provenant d'Écosse, des États-Unis ou d'Argentine Biogaz et PAC 2014 Enfin, les éleveurs français de broutards doivent surveiller les menaces d'origine proprement italienne qui pèsent sur l'activité engraisseur de l'autre côté des Alpes ; selon l'Institut de l'élevage, ces menaces vont causer une baisse « inéluctable » de la production engraissement italienne ces toutes prochaines années. 5 %, 10 %, 15 % de baisse ? Les chiffres, eux, sont encore exprimés au conditionnel, mais les raisons de ce repli sont connues : une détérioration de la valorisation des animaux finis, la hausse des coûts de production, la pression foncière dans la plaine du Pô face au mais, renforcée par le doublement des zones déclarées vulnérables dans le cadre de l'application de la directive Nitrates, le développement du biogaz par l'ensilage mais au nord du pays, les coûts supplémentaires liés au bien-être animal, et, enfin, les incertitudes autour de la future PAC d'après 2013, notamment sur le niveau des soutiens directs. Ces derniers sont élevés aujourd'hui pour les engraisseurs italiens et versés à  l'hectare. « Mais ils sont perdants dans tous les scénarios de régionalisation des aides », complète Mélanie Richard. Pour le vice-président de la Fédération nationale bovine (FNB), Jean-Pierre Fleury, l'élevage français doit « anticiper » l'évolution du marché italien et « repositionner l'engraissement en France », tout en affirmant que le marché transalpin « restera fort ». Du côté des commerçants en bestiaux (FFCB), Jean-Pierre Crassat met l'accent sur un autre marché pour les Français, celui de l'Espagne qui a absorbé beaucoup de veaux ces derniers mois, ainsi que sur le marché du Maghreb. « Il faut des broutards plus légers, explique-t-il, avec un prix plus attractif » pour aller chercher ces débouchés.

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