Publié le 08/12/2016 à 09h06 /

Un nouveau cap pour l’aide à l’installation des jeunes agriculteurs

// La réforme de la dotation jeune agriculteur (DJA) proposée par le ministère de l’agriculture a été validée par Bruxelles. La principale modification consiste en la suppression des prêts bonifiés, un dispositif créé en 1965 et rendu inopérant par la baisse des taux d’intérêt.

Le syndicat Jeunes Agriculteurs craint que l’enveloppe dédiée à l’installation ne soit pas suffisante pour répondre à tous les dossiers présentés.

Bruxelles a validé le 17 novembre dernier la réforme proposée par le ministère de l’agriculture, préparée depuis de nombreux mois en collaboration étroite avec les Jeunes Agriculteurs. D’un point de vue comptable, cette réforme consistait à trouver une nouvelle affectation à l’enveloppe destinée jusqu’ici aux prêts bonifiés, couramment appelés prêts JA. Ceux-ci ont complètement perdu de leur attractivité pour deux raisons principales: leur durée réduite de neuf à cinq ans par Bruxelles en 2015, et la baisse des taux d’intérêt sur le marché.

Dans les faits, ces prêts n’étaient plus utilisés que dans les zones de montagne. Si bien qu’en 2015, sur un budget de 21,6 millions d’euros, seuls 3,4 millions ont été attribués. Stéphane Le Foll a donc choisi de supprimer les prêts bonifiés, un dispositif vieux de plus de cinquante ans (créé en 1965), et de renforcer le dispositif de dotation jeune agriculteur (DJA) créée neuf ans plus tard.

Le prétexte de la sous-utilisation

Dans cette opération, la contribution de l’État est réduite d’environ 7 millions d’euros, puisque les montants dédiés aux prêts bonifiés (21,6 millions d’euros) sont remplacés par un abondement de seulement 14,5 millions d’euros au budget de la DJA. Au total, la loi de finances 2017 fait passer la dotation globale à l’installation (DJA +prêts bonifiés) de 47,1 millions d’euros en 2015, à 40 millions d’euros en 2017.

«L’argument avancé par le ministère pour baisser l’enveloppe a été la sous-utilisation des années précédentes, retrace le vice-président des Jeunes Agriculteurs, Pierre-Marie Vouillot. Ils nous ont dit que les négociations avaient été difficiles avec le ministère des finances». L’État argue également que son soutien réel aux jeunes agriculteurs ne baisserait que de 4 millions d’euros, car l’enveloppe des prêts JA comprenait 3 millions d’euros destinés à indemniser les banques pour la gestion de ce dispositif.

Promesses du Président

Quel que soit le niveau exact de la baisse de la dotation de l’État, il ne représente qu’une partie de ce que subiront les jeunes agriculteurs, note Pierre-Marie Vouillot, car ces dispositifs sont cofinancés par l’Europe, proportionnellement au montant fourni par l’État (80% de l’UE, 20% de l’État membre). Concrètement, ce que craignent les JA, c’est que l’enveloppe ne soit pas suffisante pour répondre à tous les dossiers présentés. Selon le syndicat, l’enveloppe de 48 millions d’euros était calibrée pour 6000 installations, et celle de 40 millions pour environ 5000 installations.

Toutefois, des gages auraient été donnés au plus haut niveau de l’État pour que tous les dossiers trouvent un financement public: «Nous avons rencontré le Président de la République, raconte le vice-président des JA. Et il nous a dit que si nous manquions de budget fin 2017, nous pourrions avoir une loi de finances rectificative». Soit une promesse conditionnée aux résultats de l’élection du printemps prochain.

Quatre modulations

La réforme va apporter deux modifications à la DJA. La première, c’est le relèvement des plafonds des montants de base, à laquelle les JA n’étaient pas favorables: ces plafonds passent de 12.000à 15.000 euros en plaine, de 17000à 22000 euros en zone défavorisée hors montagne, et de 30.000 à 36.000 euros en montagne. La deuxième modification consiste en une nouvelle modulation du montant de base.

Il en existe déjà trois: selon la nature agroécologique du projet, selon qu’on soit hors cadre familial ou dans le cadre familialou selon l’emploi et la valeur ajoutée apportés par le projet. La quatrième modulation se fera en fonction du coût de la reprise de l’exploitation et des investissements de modernisation. Elle sera au minimum de 4000 euros en zone de plaine et 8000 euros en zones défavorisées et de montagne, et réservée aux seuls projets dépassant 100.000 euros — ce seuil plancher peut être rehaussé par les Régions.

Cette modulation n’a pas de plafond et les Régions peuvent établir une grille en fonction des investissements, pour en faire varier le montant. Aux Régions de ventiler entre ces deux dispositifs les nouvelles dotations (14,50 millions d’euros de la part de l’État). Selon les JA, consigne a été donnée par le ministère de privilégier la quatrième modulation. Mais les Régions sont maîtres d’œuvre, et les débats promettent d’être animés au sein des tout nouveaux Comités régionaux installation transmission (CRIT), où se feront les arbitrages.

Consensus sur la simplification administrative

Dans l’esprit, la quatrième modulation fait perdurer dans la DJA une logique inscrite dans le dispositif des prêts bonifiés, le lien aux montants investis. C’était l’objectif de cette réforme, demandée par les JA. La principale différence avec les prêts JA, c’est que cette modulation exclut tous les projets inférieurs à 100.000 euros. Et cette exclusion concerne une part significative de la DJA, potentiellement 14,5 millions d’euros sur 40 millions d’euros, en fonction des choix faits par les Régions.

«Le seuil de 100.000 euros choisi par l’État nous paraît pertinent, il couvre la plupart des cas, considère Pierre-Marie Vouillot. Notre but, c’est d’aider toutes les exploitations. Quelqu’un qui investit moins de 100.000 euros peut déjà bénéficier de 30.000 euros d’aides. Mais, aujourd’hui, on a des projets à 400.000 ou 500.000 euros. Notre but, c’est d’aider toutes les exploitations et que ces exploitations soient viables, vivables et transmissibles».

Un point semble faire consensus dans ce dossier: la simplification administrative. Le dispositif des prêts bonifiés était vu comme un dispositif lourd à gérer par les agriculteurs et pour l’administration. Sa disparition devrait aller vers une simplification des parcours d’installation.

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