Publié le 04/01/2017 à 10h00 /

Le bœuf américain veut forcer la porte de l’Europe

// L’Europe — la France en particulier — réagit vivement aux nouvelles attaques des États-Unis sur l’emblématique dossier de la viande bovine qui avait opposé les deux côtés de l’Atlantique en 2009. Paris et Bruxelles n’entendent pas céder au chantage des Américains qui veulent mettre fin à l’interdiction d’importer dans l’UE de la viande aux hormones.

Outre la FNSEA, l’Association française pour la promotion de terroirs et des saveurs (AFPTS) demande à l’Union européenne et à l’OMC de ne pas céder au chantage des lobbies industriels américains.

On se souvient qu’aux termes d’un compromis de 2009, les États-Unis avaient levé leurs sanctions suite au boycott du bœuf US et l’UE avait accepté d’importer davantage de viande américaine de «haute qualité», tout en maintenant son veto sur le bœuf aux hormones. Sept ans plus tard, le dossier refait surface. L’administration Obama reproche aux Européens de ne pas avoir tenu leurs engagements, en important majoritairement de la viande venant d’autres pays que les États-Unis.

Elle a annoncé le 22 décembre que, suite à l’échec du TTIP qui devait «résoudre ce différend», l’USTR (représentation américaine au commerce extérieur) est «en train de prendre des mesures contre les pratiques commerciales déloyales de l’UE qui discrimine les importations de bœuf US».

Menaces de représailles

Les États-Unis ont prévu une audience publique à la demande de l’industrie américaine du bœuf, annonce l’USTR. «Il n’y a aucun doute que le bœuf américain est sûr. L’interdiction européenne depuis vingt ans a trop duré», a dit Collin Peterson, membre du House Agriculture Committee (comité agricole américain sous majorité républicaine). Par ailleurs, les États-Unis envisageraient de rétablir des droits de douane sur une liste de produits européens importés aux États-Unis.

Comme on pouvait s’y attendre, cette annonce a suscité de très vives réactions de notre côté de l’Atlantique. Les bonnes relations commerciales avec les États-Unis pourraient virer à l’aigre, a prévenu le 23 décembre l’Union européenne, «L’UE a entièrement rempli ses obligations, tant dans la lettre que dans l’esprit» a en effet rétorqué le 23 décembre la Commission européenne.

La fin de cet accord et l’éventuelle application de droits de douane sur les exportations européennes aux États-Unis représenteraient «un recul regrettable pour les fortes relations commerciales UE/États-Unis», poursuit Bruxelles.

Les États-Unis ont prévenu qu’ils envisageaient de renforcer les droits de douane sur des produits européens tels que le Roquefort, la moutarde et les truffes. Si tel était le cas, l’impact possible pour l’agriculture française se situerait entre 50 et 100 millions d’euros estime le président de la FNSEA Xavier Beulin.

En tout cas, ces menaces américaines constituent «une grosse surprise». Ces menaces sont «les dernières cartouches de l’administration Obama» et visent surtout la France. La France est le premier pays producteur de viande bovine en Europe et aussi le premier pays en matière de viande de qualité, «donc on est forcément dans le collimateur», observe Xavier Beulin.

L’Europe fragilisée

Cet impact potentiel d’une remise en cause du compromis de 2009 «dans une fourchette de 50 à 100 millions d’euros» par an suscite ainsi une vive inquiétude car la filière bovine est déjà en crise. «Probablement, côté américain, il y a cette intuition que l’Europe est fragilisée avec le Brexit, avec des États comme la France, comme l’Allemagne qui vont être soumis à des élections en 2017», analyse le président de la FNSEA.

Celui-ci n’est pas le seul à fustiger l’attitude américaine: l’Association française pour la promotion de terroirs et des saveurs (AFPTS) a également réagi vivement par un communiqué le 23 décembre. L’association, présidée par le boucher Christian Le Lann et regroupant de prestigieux noms de la gastronomie, demande à l’Union européenne et à l’OMC de ne pas céder au chantage des lobbies industriels américains. Et de lancer: «Messieurs Obama et Trump, gardez votre bœuf aux hormones si cela vous chante, mais ne nous l’imposez pas».

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